Les Nigériennes et les Nigériens aspirent au bonheur : bonheur d’avoir une maison, une famille et un cadre de vie épanoui.
Dans notre pays, les différentes ethnies accordent une place de choix au mariage. Sans le mariage et la procréation qu’il induit, les pays auront du mal à se régénérer, à rajeunir leurs populations. Vu sous cet angle, le Niger ne peut pas contrevenir au fait de se marier à une ou plusieurs femmes.
Cependant, à l’occasion de la célébration de la journée nationale de la femme le 13 mai passé, les Nigériens ont été abasourdis lorsqu’ils ont entendu les propos qui ont été proférés par le président Bazoum Mohamed relativement à la question de la polygamie au Niger. Oubliant sans doute la maxime populaire qui dit qu’avant de parler, il faut tourner sept fois la langue dans la bouche, le président Bazoum Mohamed a tenu les propos suivants : «J’ai dit à mes ministres, nous devons donner l’exemple. Tant que vous êtes dans mon gouvernement à moi, il vous est interdit de prendre une femme supplémentaire». Dans l’euphorie du moment, les femmes qui étaient présentes dans la salle se sont mises à applaudir sans réfléchir. Face à la sentence du président Bazoum, y avait-il vraiment matière à ovationner ? Assurément non ! Pour cause, la polygamie est toujours pratiquée dans la société nigérienne, car aucune loi n’a été prise pour l’interdire.
De tout temps, les populations nigériennes pratiquant la polygamie se sont appuyées sur les préceptes de l’islam, précisément la sourate les femmes en son verset trois qui dispose : «Si vous craignez d’être injustes envers les orphelins, n’épousez que peu de femmes, deux, trois ou quatre parmi celles qui vous auront plu. Si vous craignez d’être injustes, n’en épousez qu’une seule… ». Dès lors, les propos tenus par le président Bazoum Mohamed, plutôt que de plaire aux femmes qui jubilaient en face de lui, ont provoqué un grand ressentiment au sein de la communauté musulmane. Sur ce point, Issa qui est Imam dans une mosquée au quartier Banizoumbou de Niamey a réagi en ces termes : «Je désapprouve les propos tenus par le président de la République en ce qui concerne la polygamie. Il peut interdire la polygamie aux membres de son gouvernement si ça lui chante, mais il n’a aucun droit d’étendre cette interdiction à l’ensemble des autres hommes». Salamatou, cadre de l’administration publique est du même avis. «Je ne suis pas d’accord avec les propos du président Bazoum. Certes, je suis consciente que la polygamie est source de problème dans notre environnement social. Cependant le président n’a aucune autorité pour interdire l’application d’une injonction divine. Que compte-t-il faire de toutes ces jeunes et vieilles filles qui cherchent désespérément des maris ?»
Pour une opération de communication, le président Bazoum a, sans conteste, raté une occasion d’engranger des points en ce qui touche sa cote de popularité. En outre, dans notre environnement social majoritairement dominé par l’islam, il n’est pas donné à n’importe qui de s’improviser prêcheur. Le président Bazoum, pour ainsi dire, a mélangé les pinceaux dans son interprétation du verset 3 de la Sourate ‘’Les femmes’’. Suivant son raisonnement, il cherche à interdire ce que Dieu n’a pas interdit. Pour cause, quiconque lit correctement le verset 3 de la sourate comprendra qu’il n’y a aucune obligation à être polygame. La vérité qui ressort de la lecture du verset 3 de la sourate est la suivante : quiconque sait qu’il ne peut pas être juste dans le partage des nuits doit se limiter à une femme. En interdisant à ses ministres d’épouser plusieurs femmes, le président Bazoum Mohamed projette l’image d’un gouvernement d’injustes. L’injustice prenant forme à partir du moment ou des ministres, bien pourvus financièrement, se retrouvent empêcher de prendre deux, trois ou quatre femmes, du fait d’une interdiction arbitraire de la part du grand chef. Pour finir, il n’est pas exagéré de dire au président Bazoum Mohamed de consulter ses conseillers, avant de venir parler en public, particulièrement sur des sujets qui touchent la religion musulmane.
Ali Cissé Ibrahim Radio Wadata-Niamey