À Niamey, le phénomène prend de l’ampleur. D’année en année, les dépenses liées au mariage deviennent de plus en plus exorbitantes, au point de transformer un événement censé être simple, sobre et béni en une véritable épreuve financière pour de nombreuses familles. Une dérive devenue tellement récurrente qu’elle suscite désormais l’indignation et l’inquiétude sur les réseaux sociaux.
C’est dans cette dynamique qu’Arouna Abdourahamane, plus connu sous le nom de Tonton Assurance, a consacré une analyse dans sa rubrique Facebook « Autour du Thé ». Cette fois, il aborde un sujet sensible : la surcharge financière imposée aux familles lors des cérémonies de mariage. Une réflexion que la militante Safinatou Aik, très engagée dans la promotion des bonnes pratiques sociales, a largement développée en apportant des chiffres précis et alarmants. Selon elle, ce qui devait rester un acte symbolique, spirituel et sobre s’est transformé en un système socialement imposé, où chaque famille se sent obligée de « faire comme les autres » au risque d’être jugée, critiquée ou dévalorisée.
Une inflation qui étouffe les familles
D’après les montants avancés par Safinatou Aik, les dépenses exigées aujourd’hui atteignent des niveaux insoutenables :
150 000 à 250 000 F pour recevoir ceux qui viennent déposer la dot : jus, eau, rôtis, boule…
Des meubles, appareils et équipements évalués à 1 500 000 F ou plus.
Une valise d’habits destinée au marié, coûtant entre 150 000 et 500 000 F.
Des cadeaux aux belles-sœurs et beaux-parents, allant de 200 000 à plus d’un million : draps, bazins, pagnes, tasses, tapis, kits divers.
Un bœuf + sacs de riz + condiments : environ 350 000 F ou davantage.
Le foyandi, étape incontournable, estimé à 600 000 F au minimum sans compter les poulets à rôtir le lendemain du mariage, environ 200 000 F.
Autre dérive : les uniformes
Selon les témoignages recueillis, certaines familles exigent 4 à 7 uniformes pour une seule cérémonie. Une tradition qui pousse les amies, collègues ou cousines de la mariée à s’endetter pour maintenir les apparences.
Safinatou Aik questionne :
« Pourquoi acheter 7 uniformes ? Est-ce que cette amie ferait de même pour toi ? »
Un rappel à la réalité : beaucoup se ruinent pour des personnes qui, dans un contexte inverse, n’auraient pas agi de la même manière.
Un modèle social devenu insupportable
Pour un homme, se marier dans ces conditions exige aujourd’hui au moins 2 millions de francs, si ce n’est plus.
Pour les parents de la jeune mariée, la facture peut grimper jusqu’à 4 millions. Dans un pays où une grande partie de la population vit dans la précarité, ce modèle n’est tout simplement plus tenable.
La question se pose clairement :
comment un père ayant 6 ou 7 filles pourra-t-il les marier dignement sans s’endetter pour des années ?
Un appel urgent à la société et aux autorités
Face à cette spirale dangereuse, Arouna Abdourahamane et Safinatou Aik appellent à revenir à l’essentiel : la simplicité, la responsabilité, la modération et la conformité aux valeurs authentiques de notre culture et de notre religion.
Ils encouragent les familles à cesser de se laisser imposer des normes sociales irréalistes, qui ne reposent ni sur la tradition, ni sur la religion, ni sur la raison.
Les autorités, les leaders religieux et les associations interpellés
Ce phénomène, devenu systémique, appelle désormais une réponse collective :
Les autorités doivent envisager des campagnes de sensibilisation sur le coût excessif des mariages.
Les associations islamiques sont appelées à rappeler les recommandations religieuses en matière de célébration, basées sur la simplicité et non l’ostentation.
Les parents doivent également revoir leurs exigences afin d’éviter de condamner leurs enfants à retarder ou renoncer au mariage, faute de moyens.
Au-delà des chiffres et des témoignages, ce phénomène devenu presque banal à Niamey interroge profondément notre modèle social et les valeurs que nous prétendons défendre. En laissant les mariages se transformer en compétitions financières, nous exposons des familles entières à la pression, à l’endettement, parfois même à l’humiliation. Il est urgent que chacun autorités, leaders religieux, associations islamiques, mais aussi parents et jeunes prenne conscience de la dérive. Le mariage, censé être un engagement spirituel et un moment de joie, ne doit plus devenir un fardeau économique. Revenir à la simplicité, au sens, et à l’essentiel est aujourd’hui une nécessité pour protéger nos foyers, préserver notre cohésion sociale et redonner au mariage sa véritable valeur.
Adam Iboun Gueye
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